© Pierre Fabris
Extrait des lointaines carrières du mont Porphyrites, qui se dressait autrefois dans le désert Égyptien, et connu aujourd'hui comme le Ghebal Dokhan, le Phorphyre Rouge Ancien a de tout temps fasciné architectes et sculpteurs.
Pierre dure par excellence, pierre sacrée, pierre magique qui passait pour conjurer tremblements de terre et autres calamités, et, dans la Rome impériale, matériau destiné à la glorification et à la déification de l'Empereur; une loi en limitait l'utilisation aux divinités, à l'Empereur, à sa famille et aux constructions impériales.
En 457 après J. C., l'importation est arrêtée, pour des raisons inconnues; on soupçonne de mauvaises relations avec Constantinople ou plus simplement l'épuisement de la carrière. Dès lors, toute restauration ne pourrait se faire qu'avec des blocs de récupération empruntés, ou même parfois arrachés à des oeuvres plus anciennes.
Au Moyen-Age, à cause de sa dureté il tomba en désuétude, faute d'une technique adéquate pour le travailler. Mais c'est pour cette dureté même, pour son éclat, et pour sa résistance aux agents atmosphériques que les artistes de la Renaissance en font la pierre idéale.
Mais c'est le marbre en général, c'est la pierre qui fascine l'homme. Depuis toujours ils ont emprisonné des profils, des seins, des anges. Ils ont bâti des oeuvres colossales, brodé des frises, figé des noms, des dates, des secrets.
Mais ce que je connais aussi, et peut-être mieux, c'est le quotidien, l'anonyme écrasés, oubliés sous le marbre et la pierre, et qui les accompagnent comme des ombres, des ombres inconnues, légères, charnelles, des ombres abandonnées de la mémoire, des ombres Rouge Ancien.